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Dire Straits

(mauvaise passe)

Åmund GÆRSØE*

Traduit du danois par Rachid SHERIF

Nous avons participé au séminaire inter-associatif de décembre 2007. Si nous n’avons pas le souvenir d’y avoir été tirés au sort, nous avons, par contre, à l’invitation des organisateurs, prêté voix à un poème danois : ”Drøm om adresse” – « Rêve d’adresse » – du poète Henrik Nordbrandt. Le poème est repris ici, augmenté d’une traduction française. Ils offrent une occasion d’exercer la dimension funambulesque du discours analytique. Plus qu’une traduction, c’est traduire qui ici nous intéresse, en ce que traduire raisonne avec passe.

Pour d’aucuns, le séminaire terminé, le retour au pays s’est fait par Bruxelles. Sinon une passe, en tout cas un passage, d’une adresse l’autre. Bruxelles, cœur politique de l’Europe, capitale d’un pays divisé en deux langues, à l’époque sans gouvernement depuis cent jours. Cent jours qui, avec Waterloo à proximité, en évoquaient d’autres, les derniers soubresauts du règne de l’empereur. Le personnage a essaimé à son insu l’héritage de trois révolutions (1688, 1776 et 1789). Il a facilité le passage d’idées dépassant son regard, véhiculé par une langue à plusieurs autres. Après avoir porté les idées révolutionnaires aux quatre coins de l’Europe, l’empereur ne s’est jamais autorisé à sonder l’échec subi autour de quelques fermes dans la campagne belge. Il est resté pris dans l’aveuglante clarté de l’iconographie du pont d’Arcole, allant jusqu’à peaufiner son mythe d’invincibilité à Sainte-Hélène.

 

Le lecteur s’étonne ? Va-t-il s’agir de politique alors que notre sujet est la passe en psychanalyse ? De politique, quelques bribes seulement. Surtout, Waterloo offre l’occasion de contraster la volonté d’un individu,

la question du pouvoir, avec le pouvoir et les limites de la parole, des idées qu’elles véhiculent. Qu’est-ce qui (se) passe, l’un à l’insu de l’autre ? Il s’agit bien d’une problématique qui intéresse la psychanalyse au plus haut point.

 

Portons à distance du chatoiement de l'œil notre écoute. Le regard aura son dû – y aurait-il un regard qui obvierait aux forces mortifères ? –, mais regarder de tous nos yeux nous rend à la fois aveugles et sourds.

 

Au niveau de la politique justement, mettons l’icône napoléonienne de côté et relevons un texte de la même époque, celui d’une constitution, dont les premiers mots font date : « We the People … ». Ainsi s’ouvrent grandes les portes d’une société d’avenir à la primauté de l’objet marchand. Mais aussi à la démocratie, à une liberté de parole sans quoi l’invention de la psychanalyse n’aurait pas été possible. Cette évolution n’ira pas sans contrepoint, bien sûr, et un siècle et demi plus tard il y aura : « Ein Volk, Ein Reich, Ein Führer ! » ; regard noir de vengeance furibarde, acmé d’un moment (loin d’être clos) où nombreux étaient ceux à estimer l’expérience démocratique un échec.

 

En effet, la démocratie est un projet exigeant. Car le « We the People/Nous, le Peuple » ne fait nullement référence à une masse unie (« ein Volk »), mais désigne un peuple de citoyens, chacun participant de sa voix à la direction de la Cité. S’il y a bien une référence « une », il ne s’agit pas de faire Un (il suffit qu’il y ait « d’l’Un »), mais de participer un par un.

 

Nous ne saurions dans notre petit monde de la psychanalyse nous croire au-dessus de ces problématiques.

 

En introduisant la notion d’inconscient, Freud ajoute une dimension à la démocratie. Non seulement les citoyens ont leur mot à dire dans les affaire de la Cité, réseau qui à son tour les dépasse et les astreigne, mais la voix singulière de chaque sujet est-elle de surcroit déterminée par un entrelacs inconscient de signifiants. En principe, au fur et mesure d’une psychanalyse, l’écart entre le « je » et le désir s’amenuise. Paradoxe toutefois, car le désir s'articule dans la phrase vocative, où le « je » disparaît.

 

C’est une raison de s’intéresser au destin d’une analyse au-delà du cabinet. Et d’offrir aux intéressés les moyens d’en cueillir les fruits. D’où l’idée saisissante de Lacan : la passe. Dire toutefois que celle-ci porte spécifiquement sur l’expérience de l’inconscient serait excessif, tant la passe est une expérience à caractère multiple. Il s’agit plutôt d’un Work in Progress, un travail en cours. Entre la tentation d’en faire un véhicule pour des poncifs hermétiques d’école (quand le discours résiste à l’inconscient) et une passe réduite à l’étonnement, préciser la fonction du témoignage n’est pas évident.

Freud pose l’inconscient et Lacan souhaite en assurer les assises par voie du discours et de la logique. Effectivement, ne pas œuvrer à l’articulation d’un discours, d’une théorie, d’une logique en résonance avec l’inconscient équivaudrait à abandonner celui-ci aux avatars d’autres discours. Toutefois, il n’est peut-être pas inutile de rappeler, surtout aux psychanalystes, que discours, théorie et logique constituent autant de tentatives d’établir un accueil privilégié aux formations de l’inconscient. Dans l’exercice effectif du discours, dans son articulation au quotidien, il n’y a en fait que très peu d’inconscient. Il s’agit plutôt d’un exercice signifiant, parfois sous forme d’un questionnement du phantasme ou du désir, parfois sous forme d’un rappel à la castration. Mais la plupart du temps, de façon bien consciente.

 

Lacan se penche vers un collègue dont il connaît l’intérêt pour les pratiques perverses et lui chuchote à l’oreille, en sortant un billet de théâtre de la poche de son veston : « Moi aussi, j’en ai un. »

 

Alors, porter témoignage : sur quoi, pourquoi, à qui, comment et pour quoi ? Au séminaire, il a été question de fin d’analyse, de passage à l’analyste, de mise au travail de l’inconscient entre les analystes, de passe de la passe et même de désupposition de la psychanalyse. Il n’en reste qu’à l’origine de la passe, il y a la curiosité de Lacan, le souhait des analystes de recueillir quelque chose de ce qu’ils supposent circule des effets de l’analyse à perte d’ouïe.

 

*                                 *                                 *

 

Les participants au séminaire sont depuis longtemps dispersés. Que reste-t-il de l’évènement ? Le souvenir. Et l’appel des CCAF à rédiger un texte pouvant constituer une trace écrite de ce qui y a été enten-dit.

 

Du dispositif déployé au séminaire persiste l’impression d’une musicalité partagée de la parole, ayant la propriété à la fois de dire et de taire. C’est déjà quelque choses, car formulons-le d’emblée, ce texte, bien que rédigé à partir du séminaire de décembre 2007, restreint dans son ambition et centré autour du poème sus-mentionné de Nordbrandt, l’est aussi sur fond de l’échec (une sorte de Waterloo) et de la dissolution de l’association danoise Psykoanalytisk Kreds, jusqu’à sa fin membre de l’Inter-Associatif Européen de Psychanalyse. Il s’agit donc de mauvaise passe (dire straits) à plusieurs niveaux. Les déboires de l’association danoise ne sont pas sans relation avec son incapacité à faire vivre le témoignage indirect dans son rapport au cheminement de chacun dans le cadre d’une école de psychanalyse. Mais même mauvaise, une passe est une passe et la dépression qu’elle ravive, la perte dont elle constitue un rappel est aussi une occasion de renouer avec le cœur de l’expérience analytique et la problématique de sa transmission. Peut-être aussi l’occasion d’une trouvaille.

Mise à part la proposition d’utiliser l’anonymat ou un pseudonyme, les CCAF et leur rédacteur ont laissé la forme et le style de l’écrit à la discrétion des participants. L’auteur du présent texte se prête à l’utilisation d’un pseudonyme. La mise en retrait du nom propre semble une façon judicieuse de prolonger le dispositif pratiqué pendant le séminaire et fait écho au versant de la passe où l’accent est mis plus sur la psychanalyse que sur le sujet. Ainsi conçu, un temps de retrait du nom propre semble essentiel à la procédure. Passé le premier temps de la passe, le récit à la première personne distrait l’attention de l’entrecroisement des cheminements de la parole de l’un et de l’autre, entrecroisement dédié à cerner ce qui d’une analyse pourrait laisser sa marque, non sur le sujet mais sur le lien social.

 

Au départ, il y aurait la question d’éprouver en quoi la psychanalyse, une psychanalyse, permet une articulation modificatrice des réseaux signifiants qui constituent le support du sujet. Façon de questionner en quoi de telles articulations témoignent-t-elles qu’il y ait « de l’analyse ». Puis vient la question de Lacan : Comment un analysant en vient-il à la suite de son analyse à vouloir assumer la fonction d’analyste pour quelqu’un d’autre ? La question a été préférentiellement liée à celle de la fin de l’analyse et la passe inventée pour recueillir un témoignage les concernant. Notons simplement une chose bien complexe, à savoir que le cadre de la passe est un cadre autre que celui de l’analyse. Je souligne l’idée de cadre pour mettre l’accent sur la passe en tant qu’espace en propre, plus qu’un passage qui irait de l’analyse au fauteuil, ou vers un temps d’après analyse. En disant ainsi qu’il s’agit du souhait de recueillir dans un espace (celui de la passe) ce qui se ou s’est produit dans un autre (celui de l’analyse), l’incontournable de la traduction saute aux yeux. A l’instar de l’impossibilité de produire une traduction qui ne trahirait aucunement l’original, l’idée de produire dans la passe un distillé fidèle des articulations déterminantes d’une analyse est sérieusement mise à mal. D’où l’intérêt d’être attentif non seulement à ce qui vient du passant et des passeurs, mais également à l’opérabilité des traductions successives qui se font aux différents moments de la procédure. D’ailleurs, il n’est pas toujours aisé de faire la part entre une tentative de traduction, une interprétation, un investissement subjectif, un effet de sujet. Néanmoins, un ajustement de l’attention pourrait nous inciter à mettre plus l’accent, au-delà de ce qui passe ou ne passe pas, sur « de l’analyse » et « de l’analyste » au niveau des moments de la procédure, voire au niveau des divers réseaux signifiants qui s’y déploient.

 

La gageure du séminaire de décembre 2007 – en mettant à l’honneur de façon raisonnée la parole indirecte – fut de diriger l’attention sur lesdits réseaux, à la fois dans un au-delà des personnes et dans un en-deçà de la théorie, un espace où l’articulation signifiante ne fut pas trop rapidement traduite en termes théoriques ou transformée en pousse-à-l’invention.

Avant de poursuivre sur la voie que nous venons d’indiquée, revenons un instant sur le nom. Posons-nous la question de l’inconvénient, voire d’un éventuel court-circuitage dû à l’utilisation de l’anonymat, du pseudonyme. Compte tenu du rôle que joue le nom propre dans ce qui pour chaque sujet est en jeu dans une psychanalyse, il serait irréfléchi de supposer que sa mise à l’écart ne puisse porter préjudice à une procédure mettant en jeu un travail analytique, qu’il s’agisse d’une passe, d’un séminaire ou même d’un écrit. Cela vaut à la fois pour ce qui d’une passe pourrait être transmis à la communauté analytique, ainsi qu’eu égard à ce que chaque sujet pourrait être amené à faire d’elle dans un après-coup de la procédure. Néanmoins,  à l’instar d’un acte, une invention se prépare, d’où la pertinence de mettre l’accent sur la diachronie des moments la précédant, des réseaux signifiants lui fournissant appui. L’analyste, ne se prête-t-il pas à endosser un nom quelconque, à tenir la place d’objets multiples et disparates, bien qu’à chaque instant précis pour celui/celle qui lui demandent de tenir une place (sur)déterminée ? Si la procédure est en principe située au-delà du transfert, il serait mal conçu d’y chercher un analyste, ou de prétendre en instituer. Toutefois, la procédure n’est pas au-delà du transfert à la psychanalyse et il s’agit, peut-être plus que d’y cerner « de l’analyste », de se prêter à ce que les réseaux signifiants englobant diversement les participants à tous les niveaux de la procédure puissent témoigner dans leurs fonctionnements d’une présence actuelle « de l’analyste ».

 

*                                 *                                 *

 

Au risque de décevoir lecteurs et lectrices, mais en avançant d’un pas cohérent avec l’originalité de l’esprit du séminaire tel que présenté ci-dessus, ainsi que de la place qui m’y a été désignée, terminons avec quelque chose qui n’est pas directement liée à la question de la passe, mais qui cependant eu lieu au séminaire.

 

Les organisateurs avaient demandé à quelques uns des participants de faire une présentation dans la langue de leur pays. Par conséquent, au moment du dîner au Vartan, nous avons prêté corps et voix au texte ”Drøm om adresse” (« Rêve d’adresse ») du poète danois Henrik Nordbrandt. Le poème est emprunté au recueil Drømmebroer (Ponts de rêves/rêvés), publié par la maison d’édition Gyldendal en 1998 et pour lequel Nordbrandt reçut le Nordisk Råds Litteraturpris 2000, prix scandinave, dit le « petit Nobel ».

 

Nous avons souvent à l’Inter parlé des langues, de l’importance de faire passer le courant de nos échanges d’une langue à l’autre. Cela n’est pas toujours facile avec les étrangers qui se cherchent et une machine franco-française qui pendant toute une époque a été exceptionnellement bien huilée. Tant mieux pour elle, mais cela pose problème au niveau de la transmission. Quelle transmission sans traduction à deux sens ?

Donc, un petit espace aménagé au Vartan par l’équipe des CCAF pour que puissent être prononcés quelques signifiants d’ailleurs, emportés à Paris par nos amis « étrangers ». Dans l’après-coup que constitue le présent écrit, le moment au Vartan fait partie intégrante du brassage des signifiants dont il s’agissait plus haut, dans l’optique de la passe.

 

Pourquoi un poème ? Pourquoi ce poème ?

 

Y a-t-il une forme qui se prête mieux au travail de signifiant (traduction, interprétation, désignation, nomination) qu’un poème (doublé de rêve !) ?

 

Reprenons-le à présent, avec traduction française (en italique) et remarques.

 

 

”Jeg dør den dag, jeg finder adressen.”

 

« Je mourrai le jour où je trouverai l’adresse. »

 

 

L’adresse ultime est effectivement la mort, la soumission incontournable au Maître Absolu. Mais il y a aussi l’angoisse du névrosé de disparaître à l’accomplissement supposé du désir. Comme s’il n’y aurait rien au-delà du désir, alors que le désir tel qu’il est articulé par le névrosé est plutôt phantasme, écran de fumée, servant à la fois à soutenir et occulter le désir. On dit aussi mourir de honte ; mourir de honte à l’idée d’assumer ses phantasmes, ses désirs. Et bien d’autres adresses, dont la pertinence, ou le manque de telle, font et défont les liens qui font vivre le sujet.

 

 

Og fordi jeg ikke ved, hvor de ord kommer fra

melder dens lugt sig: Kål, flæsk og kartofler

og kurve med snavset tøj (udtalt snavstøj).

 

Et, puisque je ne sais pas d’où viennent ces mots

son odeur se déclare : Chou, lard et pommes de terre

et des paniers de linge sale (linge très sale).

 

 

D’où viennent les mots ? Les mots auxquels notre destin est suspendu ? La question des origines nous hante et son caractère énigmatique nous renvoie au corps. D’où viennent les enfants ? D’où viennent les parents ? Souvenirs du premier orgasme, de la première pénétration : frittes, mayonnaise et ketchup. Tant de réussites, tant de ratages. Ces commencements qui nous échappent au moment même où nous sommes tentés de nous dire que nous les avons apprivoisés.

Jeg står i mørket på køkkentrappen med en lommelygte

og trøster mig med, at den er købt i en lille biks

bag hvide arkader ud til Middelhavet.

Je suis debout dans le noir d’un escalier de service avec une lampe de poche

et je me console qu’elle ait été achetée dans une échoppe

derrière des arcades blanches donnant sur la Méditerranée.

 

 

Comment faire avec de modestes outils ? Quel enfant n’a pas rêvé d’origines plus nobles que les siennes ?

 

 

Så der er altså styr på tingene. Dr. Møller!

Dem kommer jeg ikke til at besøge igen

og jeg har desuden ikke brug for flere attester.

 

On a donc les choses en main. Dr. Møller !

Je ne vous rendrai plus visite

et d’ailleurs je n’ai plus besoin de certificats.

 

Enfin la maîtrise ! Exeunt les docteurs.

 

 

Hvis jeg ikke vil spille fodbold, lader jeg bare være.

Si je ne veux pas jouer au foot, je m’en dispense sans façon.

Il ne fait pas ce qu’il ne veut pas faire, sans toutefois desserrer les dents sur ce dont il aurait envie. Pas question ici de “money for nothing and chicks for free”.** La maîtrise, c’est dire « non ». Oui, cela commence volontiers ainsi.

Og hvis jeg bliver alvorligt syg, har jeg penge nok

til at købe en hvilken som helst gift illegalt.

Et si je tombe gravement malade, j’ai les moyens

de m’offrir n’importe quel poison illicite.

 

 

Par contre, lorsqu’il connaîtra de graves difficultés (dire straits, en anglais), il s’imagine prêt à agir. Son pécule lui permettra de pactiser avec ce qui le détruira, en hâtant la fin.

 

Det var dén etage. På den næste

bor spillemændene, som ingen har set

men alle elsker at beklage sig over

og frøkenerne med det mærkelige navn Olafsson.

 

Voilà pour cet étage. Au suivant

demeurent les musiciens, que personne n’a vus

mais dont tous adorent se plaindre

et les demoiselles avec le nom étrange d’Olafsson.  

 

 

La fin à présent orchestrée, il y aurait un peu de place pour le jeu : la musique, les plaintes (passe-temps de prédilection), les femmes (toujours étrangères, même avec un nom aussi scandinave qu’Olafsson). Mais y a-t-il un doute sur l’identité sexuelle, sur la filiation (Olafsson) ? Et qui était le père Olaf ?

 

 

Nøglehullerne fungerer som røntgenapparater.

Skeletterne er lugtfri og meget dekorative

hvad de også selv synes at sætte pris på

eftersom de spejler sig i stedet for at spise.

 

Les trous de serrures fonctionnent comme appareils à rayon X.

Les squelettes sont inodores et très décoratifs

ce qu’ils semblent apprécier

puisqu’ils se regardent dans le miroir au lieu de manger.

 

 

L’art et les sciences arrivent à la rescousse, regards modernes en principe aptes à obvier aux forces mortifères. Mais ce n’est pas gai. Les plaisirs de la chaire, si vite disparus.

 

 

Men det er hende på 4. sal jeg er kommet for at se

den lille pige, der aldrig blev voksen.

 

Mais c’est elle au 4ème que je suis venu voir

la petite fille qui n’a jamais grandi.

 

 

A une époque où les K7 étaient encore assez courantes, un monsieur d’un certain âge se penche vers une jeune femme, qui d’ailleurs n’est pas si jeune que ça, et lui demande, avec un sourire en coin : « Vous n’auriez pas par hasard une cassette vierge ? »

Que cherche-t-il ? L’innocence ? La pureté ? La maîtrise ? Le contrôle ? L’effacement de la tache ? Pouvoir reprendre les choses à zéro ?

Les aspirations à un monde meilleur trouvent leurs expressions les plus radicales et se répartissent entre projets de pureté révolutionnaire (de droite ou de gauche) et une référence religieuse absolument pure.

Cela a pris à l’église (catholique) de nombreux siècles pour parcourir le chemin allant de la conception virginale à l’immaculée conception. La Vierge Marie serait la seule parmi tous les humains à ne jamais avoir été souillée par le pêché originel. Cela n’est pas le hasard si le dogme a finalement été officiellement consacré en 1848, en plein cœur de l’ère des révolutions.

Qui veut grandir ?

 

 

Og da slår det mig

at jeg på grund af langt senere oplevelser

som jeg dog kun kom ud for, fordi jeg havde været fange her

må være kommet ind i en helt forkert gade, et forkert hus

der blot ligner noget, som også engang lignede.

 

Alors, cela me frappe

qu’en raison d’évènements vécus bien après

et qui toutefois ne me sont arrivées que parce que j’avais été prisonnier ici

j’ai du m’engager dans une mauvaise rue, une mauvaise habitation

qui ne faisait que ressembler à quelque chose qui jadis aussi ressemblait.

 

 

Qu’il ait eu une idée de ce qu’il cherchait n’a pas empêché notre protagoniste de jouer des quilles face au discernement de Chronos. Alors, il s’est enfoncé dans un dédale de (res)semblances. Il ne semble toutefois pas y avoir perdu son latin. Reposons, en la traduisant, la question de l'adresse : Dans quelle direction à présent ?

Noter:

* Åmund signifie « la bouche du ruisseau » et résonne avec åmand (dit également, nøkke), ondin, esprit des eaux, un être surnaturel qui habitait les cours d’eau et exigeait des victimes humaines. Depuis le Moyen Âge, il crie que si le moment est là, la victime ne l’est pas. Aujourd’hui, un åmand est quelqu’un qui entretient les cours d’eau, qui s’occupe de l’environnement. Nombreux sont les Gærsøe à avoir exercé le secrétariat. [N. du T., avec permission de l’auteur.]

** En français : « de l’argent pour rien et des nanas gratis », de la chanson ”Money for Nothing” des Dire Straits, sur le CD Brothers in Arms.

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